Alexis Tsipras a été conforté dimanche dernier lors des élections anticipées en Grèce, comme l’avait prédit l’experte Anna Visvizi. Aujourd’hui, elle nous propose une analyse post-électorale.


Chère Anna,

Tu avais raison dans ton pronostic, Alexis Tsipras a été reconduit à la tête du gouvernement grec ! Que penses-tu de la stabilité de ce gouvernement ? Qu’en attendent réellement les électeurs grecs ?

Et maintenant, Monsieur Tsipras ?

Les élections anticipées en Grèce ont donc accouché d’un gouvernement très similaire au précédent. Avec 35.5% du vote et 145 sièges (sur 300) au parlement, Alexis Tsipras a été en mesure de former une nouvelle coalition entre son parti, Syriza, et son ancien partenaire, les Grecs Indépendants. La presse internationale a salué sa victoire, et ses militants en Grèce ont exulté. A-t-il pour autant les coudées franches ? Il est bien possible qu’il ait remporté une victoire à la Pyrrhus, car il est certes populaire, il a certes été conforté, mais il n’en reste pas moins piégé.

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Alexis Tsipras

Piégé d’abord par le carcan du troisième programme d’aide financière qu’il a négocié en juillet, qui a été voté par son parlement en août, et qu’il faut désormais mettre en œuvre. Afin de percevoir le 86 milliards d’Euro promis pour la période 2015-2018, Tsipras sera bien obligé de faire adopter des budgets 2015 et 2016 révisés, ainsi que la « stratégie fiscale à moyen terme » que réclament le créanciers et qui fera mal. Elle sera accompagnée de la deuxième tranche de la réforme des retraites et d’autres mesures qui mériteront bien le label d’ « austérité ».

Le nombre de mesures qui doivent maintenant passer par le processus législatif suggère que les premières semaines du nouveau gouvernement seront assez désagréables. Peu convaincu lui-même par les mesures qu’il doit mettre en œuvre, exposé à la critique facile et acerbe d’une partie de l’opposition, confronté en permanence à un électorat démoralisé et la pression des créanciers, Alexis Tsipras naviguera en eaux troubles.

Inévitablement, au fur et à mesure que la contestation populaire se fera entendre, des fissures se feront jour au sein même du gouvernement. C’est pourquoi Tsipras aura à cœur de mobiliser son cheval de bataille le plus fiable, celui qui lui vaut soutien et crédibilité dans son pays comme à l’étranger : la lutte contre la corruption et les liens incestueux entre politique et business. C’est bien en se mettant en scène comme le héraut de l’anti-corruption, du changement et du renouvellement du paysage politique en Grèce, qu’il a réussi à reconquérir les cœurs de son électorat.

Il n’en reste pas moins que pour combattre la corruption, le favoritisme et le népotisme, il faut s’attaquer aux racines du mal. En Grèce, cela impliquerait de démanteler une collusion malsaine entre l’Etat et l’économie, c’est-à-dire restructurer le secteur public, privatiser massivement, changer toute la culture des affaires. Quelle que soit sa popularité, Alexis Tsipras peut-il seulement y arriver ?


Anna Visvizi 2015

Anna Visvizi


Anna Visvizi, PhD is professor of international business and

European affairs at the American College of Greece in Athens

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